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Consultation de l’Autorité de la concurrence sur les programmes de compliance aux règles de concurrence[1]

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Un nouveau document-cadre sur les programmes de conformité aux règles de concurrence, publié par l'Autorité de la concurrence le lundi 11 octobre 2021, est soumis à consultation publique jusqu'au 10 décembre 2021. Il fait suite aux travaux du groupe d'experts constitué en 2020 et, plus généralement, aux souhaits exprimés par les acteurs du marché, de pouvoir bénéficier d'un texte de référence sur lesdits programmes. Son adoption définitive devrait intervenir « dans les meilleurs délais » à la suite de la consultation publique. 

Le maintien d'une position « neutre-positive » vis-à-vis des programmes de compliance ?
La mise à jour du document-cadre était fortement attendue depuis le document initialement publié en 2012 et retiré en 2017 au moment de la réforme de la procédure de transaction. Ce document prévoyait que l'entreprise dont les engagements de conformité en concurrence étaient pertinents, crédibles et vérifiables pouvait se voir octroyer auparavant une réduction d'amende jusqu'à 10%. Mais l'Autorité est revenue sur sa position en 2017: tout en réaffirmant l'importance qu'elle attache aux programmes de conformité concurrence, elle estime depuis lors que leur élaboration et mise en œuvre ont vocation à s'insérer dans la gestion courante des entreprises.    
 
Si le projet du document-cadre reprend une partie des éléments clés figurant dans le document de 2012 (à savoir, l' intérêt de la mise en place d'un programme de conformité et les conditions de leur efficacité), il n'est fait aucune mention d'une quelconque « réduction » de sanction dont pourrait se prévaloir l'entreprise ayant commis une infraction mais étant parallèlement dotée d'un programme de conformité concurrence « pertinent, crédible et vérifiable ». L'Autorité semble ainsi maintenir une position « neutre-positive » vis-à-vis des programmes de conformité concurrence : avoir un tel programme ne constitue ni une circonstance atténuante, ni une circonstance aggravante en cas de violation des règles de concurrence, même si sa mise en œuvre au sein de l'entreprise est « encouragée » par l'Autorité.  
 
Bien que cette position « neutre-positive » (ou minimaliste, selon les points de vue) soit partagée par l'Autorité allemande et par la Commission européenne,  plusieurs autorités nationales de concurrence acceptent de considérer les programmes de compliance (ex ante ou ex post) comme une circonstance atténuante - dès lors que leur mise en place est effective, et non pas simplement artificielle. Ainsi, l'entreprise dotée d'un programme de compliance antitrust peut se voir accorder, sous certaines conditions :
  • une réduction jusqu'à 3 points du « score de culpabilité » aux Etats-Unis ;
  • une réduction de la sanction pécuniaire jusqu'à 10% au Royaume-Uni ;
  • une réduction de la sanction pécuniaire jusqu'à 15% en Italie ;
  • et même une exonération totale en Espagne[2] !

L'Autorité de la concurrence française, elle, ne semble pas (du moins pour l'instant) prête à revenir à la situation antérieure au Communiqué de 2017. Pour autant, les programmes de compliance antitrust sont de plus en plus souvent déployés par les entreprises, notamment celles ayant des filiales établies à l'international. En effet, que l'Autorité prenne ou non en compte l'existence d'un programme lors du calcul d'une éventuelle sanction, les entreprises doivent intégrer les bénéfices qu'elle peuvent retirer d'un tel programme, qu'il s'agisse de la prévention, détection ou remédiation de risques juridiques, financiers ou réputationnels. A ce titre, l'Autorité rappelle également qu'un programme de conformité concurrence favorise la détection et le signalement des infractions pour bénéficier de la procédure de clémence.

 

Les 5 piliers d'un programme de compliance antitrust « efficace ».

Le document-cadre énumère les axes autour desquels tout programme de conformité devrait être construit :
    1. Un engagement public de l'entreprise à travers ses dirigeants et mandataires sociaux - connu aussi sous le nom de « tone at the top » ;
    2. Des relais et experts internes ayant le temps, les pouvoirs et les moyens humains et financiers suffisants pour assurer la mise en œuvre effective du programme ;
    3. Une information, formation et sensibilisation auprès de tous les salariés de l'entreprise ;
    4. Des mécanismes de contrôle et d'alerte afin d'assurer le respect du programme à tous les niveaux de l'entreprise ;
    5. Un dispositif de suivi via une procédure de traitement des demandes de conseil et des alertes, ainsi qu'une procédure de sanction.

 

Le programme permettrait ainsi d'atteindre une « culture » de conformité aux règles de concurrence (terme repris huit fois dans le document-cadre). Ces cinq piliers font écho à ceux mentionnés par les autres autorités nationales de concurrence et par les bonnes pratiques internationales. Même si l'Autorité  précise que le programme de conformité concurrence est un projet « sur-mesure », on peut regretter que parmi les points-clés ne soient pas expressément inclues l'identification et l'évaluation des risques antitrust spécifiques à l'entreprise, dans la mesure où un programme de compliance efficace doit nécessairement se fonder sur une cartographie permettant d'identifier, évaluer et hiérarchiser les risques encourus par l'entreprise en fonction de son profil de risque (e.g. structure du marché, géographies, pratique décisionnelle antérieure, conséquences de la transposition de la Directive ECN +[3], etc.).

 
L'Autorité souligne néanmoins qu'un programme de conformité concurrence doit faire l'objet d'une veille régulière afin d'être éventuellement mis à jour, puisque les questions en matière de conformité concurrence peuvent « fluctuer au fil du temps, en fonction de l'évolution du cadre législatif, de la jurisprudence ou de la pratique décisionnelle des autorités de concurrence, mais aussi de la situation propre à l'entreprise et aux marchés au sein desquels elle opère ». 
 

Les programmes de conformité concurrence, à la lumière du « choc de compliance ».

Les entreprises ont connu un véritable « choc de conformité » au cours des dernières années (Sapin II, RGPD, LCB-FT, Vigilance, Sanctions-Embargos, Directive Lanceurs d'alertes, Directive MAR, etc.). Les programmes de conformité concurrence doivent naturellement s'inscrire dans ce cadre et il serait heureux que les autorités de régulation harmonisent leurs positions afin de renforcer la sécurité juridique des entreprises, l'enjeu pour ces dernières étant de pouvoir concevoir des dispositifs cohérents s'appuyant sur des référentiels communs, et ce d'autant plus que les autorités se concertent régulièrement lors de leurs contrôles.
 
Ainsi, la méthodologie de cartographie des risques de corruption pourrait inspirer l'élaboration de la cartographie des risques concurrence. De même, compte tenu de la similitude des situations, il ne nous paraitrait pas déraisonnable que l'Autorité s'inspire, en complément des outils de procédure négociée (clémence, transaction) de la philosophie des Lignes Directrices AFA/PNF[4] en matière de Convention Judiciaire d'Intérêt Public (« CJIP »), qui reconnaissent les programmes de conformité effectifs comme un facteur minorant lors du calcul de l'amende dans le cadre d'une CJIP.
 
Il sera donc intéressant de suivre attentivement les retours de la consultation de l'Autorité et les suites qui lui seront données.
 
[1] Article co-rédigé par Jean-Yves Trochon, Hugues Boissel Dombreval et Pénélope Domagk.

[2] Sur la question, cf. Programme Compliance Antitrust 210511 | Rödl & Partner (roedl.fr)

[3] Sur la question, cf. : Antitrust Directive ECN + | Rödl & Partner (roedl.fr)

[4] Lignes directrices PNF CJIP.pdf

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