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Renforcement de l'arsenal de l'administration fiscale française pour contrôler les prix de transfert

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​​​​​​Les prix de transfert sont déjà depuis plusieurs années en France un des sujets donnant lieu au plus de redressements fiscaux et il semble que la tendance n'est pas prête à s'inverser.De nouvelles mesures renforçant les pouvoirs de l'administration fiscale française en matière de contrôle des prix de transfert ont en effet été adoptées via la loi de finances pour 2024.[1] 

L'exposé des motifs du législateur français indique clairement que l'objectif est, conformément auxannonces du plan de lutte contre toutes les fraudes aux finances publiques, « de renforcer la capacité de l'administration à détecter et sanctionner les utilisations abusives des règles de prix de transfert ».[2]
Les mesures prises sont de deux types :

  • Celles portant sur l'obligation de documenter par écrit la politique de prix de transfert – 1. ;
  • Celles portant sur les transferts d'actifs incorporels difficiles à évaluer – 2.;

​ 

1. La documentation de la politique des prix de transfert devient opposable au contribuable et est désormais obligatoire pour un plus grand nombre d'entreprises

 

Première mesure : Abaissement du seuil de 400 à 150 millions d'euros pour l'obligation de produire une documentation des prix de transfert [3]

Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024, sont désormais tenues de tenir à la disposition de l'administration fiscale une documentation complète de leur prix de transfert (Masterfile et Localfile) les personnes morales établies en France qui remplissent l'un des quatre critères suivants :

  1. Avoir un chiffre d'affaires annuel hors taxes ou un actif brut au bilan supérieur ou égal à 150 millions d'euros, ou
  2.  Détenir à la clôture de l'exercice, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital ou des droits de vote d'une entité juridique ayant un chiffre d'affaires annuel hors taxes ou un actif brut au bilan supérieur ou égal à 150 millions d'euros, ou
  3. Être détenue à plus de la moitié du capital ou des droits de vote, à la clôture de l'exercice, directement ou indirectement, par une entité juridique ayant un chiffre d'affaires annuel hors taxes ou un actif brut au bilan supérieur ou égal à 150 millions d'euros, ou
  4. Appartenir à un groupe d'intégration fiscale en France au sein duquel au moins une personne morale remplit les critères mentionnés au 1., au 2. ou au 3.

L'obligation écrite de documentation des prix de transfert n'est donc plus la seule préoccupation des multinationales et autres grands groupes.


Les groupes de taille moyenne se trouvent désormais également concernés et devront donc penser, une fois la clôture de leurs comptes 2024 réalisée, à préparer cette documentation.

​ 

Deuxième mesure : Présomption de transfert de bénéfices à l'étranger en cas de non-respect de la politique décrite dans la documentation des prix de transfert[4]

 

Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024, lorsque la méthode de détermination des prix de transfert appliquée par le contribuable s'écarte de celle prévue au sein de sa documentation écrite (Masterfile et Localfile), l'écart constaté entre le résultat et le montant qu'il aurait atteint si la méthode prévue au sein de cette  documentation avait été respectée est réputé constituer un bénéfice indirectement transféré.

 

Cette mesure a une portée très importante puisqu'elle renverse la charge de la preuve : si la politique des prix de transfert appliquée n'est pas conforme à celle décrite dans la documentation, il ne revient plus à l'administration de démontrer qu'un transfert de bénéfices à l'étranger a eu lieu mais, au contribuable, de démontrer l'absence de transfert de bénéfices à l'étranger.
Les conséquences pratiques pour les contribuables risquent d'être lourdes puisqu'il n'est pas rare de constater des écarts entre la politique écrite de détermination des prix et les flux effectivement enregistrés en comptabilité locale (French GAAP).

 

Les contribuables devront donc porter une attention toute particulière à leur documentation écrite de politique des prix de transfert relative à l'exercice 2024 et suivants et anticiper tout écart entre la méthode décrite et son application concrète sur les prix pratiqués.

​ 

Troisième mesure : Augmentation à 50 000 euros (au lieu de 10 000 euros) de la pénalité minimum applicable en cas de défaut de production de la documentation des prix de transfert[5]

Pour rappel, le défaut de réponse ou la réponse partielle à la mise en demeure de l'administration fiscale de produire une documentation des prix de transfert entraîne l'application, pour chaque exercice vérifié, d'une amende pouvant atteindre, compte tenu de la gravité des manquements, le plus élevé des deux montants suivants :

  • 0,5 % du montant des transactions concernées par les documents ou compléments qui n'ont pas été mis à disposition de l'administration après mise en demeure ;
  • 5 % des rectifications du résultat fondées sur le contrôle des prix de transfert et afférentes aux transactions concernées par les documents ou compléments qui n'ont pas été mis à disposition de l'administration après mise en demeure.

Le montant de l'amende ne peut désormais être inférieur à 50 000 €, au lieu de 10 000 € auparavant.

​ 

2. Facilitation des contrôles des transferts d'actifs incorporels difficiles à évaluer

Pour rappel, les actifs incorporels difficiles à évaluer sont des actifs incorporels ou des droits sur des actifs incorporels pour lesquels, au moment de leur transfert entre des entreprises associées :

a) Il n'existe pas d'éléments de comparaison fiables ; et
b) Au moment où l'opération a été conclue, les projections concernant les futurs flux de trésorerie ou revenus attendus de l'actif incorporel transféré, ou les hypothèses utilisées pour évaluer cet actif incorporel sont hautement incertaines, et il est donc difficile de prévoir dans quelle mesure l'actif incorporel débouchera finalement sur un succès au moment du transfert.[6]

​Première mesure : Possibilité pour l'administration de réévaluer le prix de vente sur la base de résultats postérieurs à l'exercice au cours duquel le transfert a eu lieu[7]

Pour rappel, les actifs incorporels difficiles à évaluer sont des actifs incorporels ou des droits sur des actifs incorporels pour lesquels, au moment de leur transfert entre des entreprises associées : Cette possibilité de rectification sur la base de résultats postérieurs n'est toutefois pas applicable dans les cas suivants :

  1. Le contribuable, d'une part, fournit des informations détaillées sur les prévisions utilisées, au moment du transfert, pour déterminer les prix et, d'autre part, établit que la différence significative entre ces prévisions et les résultats réels est due soit à la survenance d'événements imprévisibles lors de la détermination du prix, soit à la réalisation d'événements prévisibles, à la condition que leur probabilité d'occurrence n'ait pas été sous-estimée ou surestimée de manière significative au moment de la transaction ;
  2. Le transfert en cause est couvert par un accord préalable en matière de prix bilatéral ou multilatéral, en vigueur pour la période concernée, entre les juridictions du cessionnaire et du cédant ;
  3. L'écart entre la valorisation résultant des prévisions établies au moment de la transaction et celle constatée au vu des résultats réels est inférieur à 20 % ;
  4. Une durée de commercialisation de cinq ans s'est écoulée après l'année au cours de laquelle l'actif ou le droit a produit pour la première fois des revenus provenant d'une entité non liée au cessionnaire et, durant cette période, l'écart entre les prévisions établies au moment de la transaction et les résultats réels est inférieur à 20 %.

Deuxième mesure : Extension du délai de reprise de l'administration de 3 à 6 ans pour la possibilité de réévaluer le prix de vente sur la base de résultats postérieurs à l'exercice au cours duquel le transfert a eu lieu[8]  

La possibilité de rectification du prix de vente sur la base de résultats postérieurs à l'exercice au cours duquel le transfert a eu lieu est ouverte à l'administration fiscale jusqu'à la fin de la sixième année (au lieu de la troisième année d'après les règles de droit commun) qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Ainsi, en cas de transfert d'un actif incorporel difficile à évaluer réalisé en 2025, l'administration fiscale aura jusqu'au 31 décembre 2031 pour procéder à une réévaluation du prix de vente.


Troisième mesure : Possibilité pour l'administration de réévaluer le prix de vente sur la base de résultats postérieurs à l'exercice au cours duquel le transfert a eu lieu quand bien même l'exercice au cours duquel le transfert a eu lieu a déjà fait l'objet d'une vérification de comptabilité[9]

Le législateur a introduit une nouvelle exception à la garantie de non renouvellement d'une vérification de comptabilité afin de permettre à l'administration fiscale de venir contrôler le prix de vente appliqué aux transferts d'actifs incorporels difficiles à évaluer, quand même bien l'exercice au cours duquel le transfert a eu lieu a déjà fait l'objet d'une vérification de comptabilité.

 

Les contribuables doivent donc désormais disposer d'une documentation des rapports de valorisation encore plus solide pour justifier le prix qu'ils appliquent aux transferts d'actifs incorporels difficiles à évaluer.


[1] Article 116 de la l​oi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024

[2] Article 22 du projet de loi de finances n°1680 pour 2024

[3] Mesure transposée à l'article L. 13 AA du Livre des Procédures Fiscales

[4] Mesure transposée à l'article 57 du Code Général des Impôts

[5] Mesure transposée à l'article 1735 ter du Code Général des Impôts

[6] Cf. la définition mentionnée au 2° du E du II de l'article 1649 AH du Code Général des Impôts

[7] Mesure transposée à l'article 238 bis-0 İ ter du Code Général des Impôts

[8] Mesure transposée à l'article L. 171 B du Livre des Procédures Fiscales

[9] Mesure transposée à l'article L. 51 8° du Livre des Procédures Fiscales​​

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Aurélia Froissart

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