Nous utilisons nos propres cookies et ceux de tiers à des fins statistiques et d'amélioration du site web. Veuillez sélectionner ci-dessous les cookies que vous souhaitez accepter ou refuser. Si vous poursuivez votre navigation sans sélectionner de cookies, cela équivaut à refuser les cookies. Pour plus d'informations, veuillez consulter notre politique de confidentialité.



Décision du Tribunal judiciaire de Paris du 13 février 2025 sur le Devoir de Vigilance

PrintMailRate-it

​​​​​​​​​​​​​​​​​​​​Paris | 09.07.2025

Le jugement de la 34e chambre du tribunal judiciaire de Paris du 13 février 2025 a rejeté une demande de la CFDT de mise à jour du plan de vigilance de la SNCF, suite à la réorganisation de l’activité de fret ferroviaire de la SNCF (le « plan de discontinuité »). Il s’agit là de la seconde décision de fond statuant sur le Devoir de vigilance instaurée par la loi du 27 mars 2017. ​


S_2139739.jpg

Le contexte

Pour comprendre la décision du Tribunal judiciaire de Paris, il convient de revenir sur les raisons de la réorganisation du fret ferroviaire de la SNCF.

En janvier 2023, la Commission européenne avait ouvert une enquête approfondie afin de déterminer si certaines mesures de soutien françaises en faveur de Fret SNCF étaient conformes aux règles de l'Union européenne en matière d'aides d'État. Selon la Commission, le montant du soutien financier contesté s’élevait à près de 5,5 milliards d’euros, sur une période allant de 2007 à 2019.

Plutôt que de contester la procédure sur le fond, le ministre des Transports de l’époque, Cément Beaune, décida de négocier avec Bruxelles la réorganisation de l’activité fret ferroviaire de la SNCF. Cette solution a consisté en :
  • ​L’abandon à la concurrence, par Fret SNCF, de 23 flux de marchandise parmi les plus rentables (les « trains dédiés »), soit 30 % de ses trafics représentant 20 % de son chiffre d’affaires, et ce dès le premier semestre 2024,
  • La création de deux entités nouvelles à compter 1er janvier 2025 : Hexafret (pour le transport de marchandises) et Technis (pour la maintenance des locomotives), en remplacement de Fret SNCF.
La Commission européenne exigeait en effet que la nouvelle organisation du fret ferroviaire en France soit suffisamment différente de l’ancienne pour ne plus être redevable des aides d’Etat contestées : c’est le « plan de discontinuité ».

En parallèle de son action devant le Tribunal judiciaire de Paris relative au plan de vigilance de la SNCF, la CFDT avait engagé une procédure devant le Conseil d’Etat, visant à ce que l’Etat renonce au plan de discontinuité mis en œuvre et revienne sur sa recommandation de réforme du Fret SNCF.

Or, le Conseil d’Etat, dans sa Décision n° 492986 du 23 décembre 2024, rejeta la requête de la CFDT, arguant que « [le] courrier du 23 mai 2023 [par lequel le ministre des transports annonce au PDG du groupe SNCF les mesures relatives à l'activité de fret en cause] se borne à suggérer notamment des transformations structurelles de l'activité fret du groupe SNCF qu'il appartiendrait à ce dernier de mettre en œuvre […] ».
Restait donc à la CFDT l’espoir que le Tribunal judiciaire de Paris entende ses arguments quant à la nécessaire mise à jour du plan de vigilance de la SNCF et l’illégalité du plan de discontinuité. ​

La demande de mise à jour du plan de vigilance de la SNCF

Le Tribunal rejette la demande de la CFDT d’actualisation de la cartographie des risques de la SNCF, au motif que cette demande serait « formée de manière générale sur le risque écologique inhérent au transport routier de marchandises à partir des études environnementales sur les émissions de gaz à effet de serre dans le domaine du transport, sans identifier de manière précise et concrète les risques et les atteintes graves à prévenir sur l’environnement, sur la santé ou la sécurité des personnes ».

Cette approche revient, nous semble-t-il, à inverser la charge d’identifier les risques liés à l’activité de la société sur le demandeur, plutôt que sur l’entreprise responsable de cette cartographie.

En outre, l’argument selon lequel la cession par Fret SNCF des flux dédiés à des entreprises tierces n’entraine aucune obligation de mise à jour du plan de vigilance nous semble contestable. Si, comme le considèrent le Conseil d’Etat et le Tribunal judiciaire, Fret SNCF est responsable de la décision de démantèlement de Fret SNCF prise suite aux « suggestions » du Ministre, pourquoi Fret SNCF ne devrait-elle pas assumer les conséquences de cette décision en actualisant son plan de vigilance considérant les interrogations légitimes soulevées par cette décision ? 


La demande en réparation pour illégalité prétendue du plan de discontinuité ​

Compte tenu de l’avancée de la réorganisation, la CFDT ne demandait plus la suspension du plan de discontinuité mais la réparation du préjudice subi en raison de caractère prétendument illicite.
La CFFDT invoquait, à l’appui de ses demandes devant le Tribunal judiciaire de Paris :
  • ​La loi du 22 août 2021 n° 2021-1104 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « Loi Climat et résilience ». L’article 131 de la loi prévoit en effet que La France se fixe pour objectif de tendre vers le doublement de la part modale du fret ferroviaire dans le transport intérieur de marchandises d'ici 2030 ;
  • L’article 1833 du Code civil, selon lequel une société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité., en mobilisant l'ensemble des acteurs publics et privés concernés » ;
  • L’article L. 2101-1 du Code des transports, selon lequel « La […] SNCF et ses filiales […]  constituent un groupe public unifié qui remplit des missions de service public dans le domaine du transport ferroviaire et de la mobilité […], dans un objectif de développement durable, de lutte contre le réchauffement climatique, d'aménagement du territoire et d'efficacité économique et sociale ».
S’agissant de l’article 131 de la Loi Climat et résilience, le Tribunal judiciaire de Paris considère qu’il s’agit d’un engagement de l’Etat dont la prétendue violation ne peut être reprochée à Fret SNCF. Il s’agit là d’un aspect intéressant de la décision du Tribunal, qui confirme ainsi que la loi Climat et résilience n’impose pas d’obligations aux entreprises.

En l’espèce, le Tribunal note que les dispositions de l’article 1833 du Code civil et de l’article L 2101-1 du Code des transports s’appliquent à Fret SNCF et l’oblige « à prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité et s’inscrire dans un objectif de développement durable et de lutte contre le réchauffement climatique ». Toutefois, le Tribunal considère qu’il n’y a eu, en l’espèce, « aucun élément démontrant que la décision de restructurer Fret SNCF ait été prise sans que l’entreprise prenne sérieusement en considération l’impact de sa décision sur les enjeux sociaux et environnementaux ». ​

Contact

Contact Person Picture

Hugues Boissel Dombreval

Avocat, Attorney-at-law

Associate Partner

+33 6 12 50 47 17

Envoyer la demande

Contact Person Picture

Jean-Yves Trochon

Avocat au barreau de Paris

Senior Counsel

+33 6 13 88 57 52

Envoyer la demande

Befehle des Menübands überspringen
Zum Hauptinhalt wechseln
Deutschland Weltweit Search Menu