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La soumission à l’impôt sur les sociétés d’une quote-part de frais et charges sur dividendes peut constituer une imposition et permettre aux sociétés mères françaises percevant des dividendes de filiales étrangères l’imputation de crédits d’impôt étranger

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Par une décision du 5 juillet 2022,[1] le Conseil d'Etat a jugé dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir que la réintégration d'une quote-part de frais et charges (QPFC) sur les dividendes perçus de filiales conduit à imposer une partie du revenu chez la société mère. Il met ainsi en échec la doctrine administrative refusant l'imputation de crédits d'impôt étrangers sur l'impôt sur les sociétés payé par les sociétés mères au titre de la QPFC.

 

Pour rappel, les sociétés mères françaises qui perçoivent des dividendes de leurs filiales peuvent, en application du régime dit « mère-fille »[2], bénéficier sous certaines conditions[3] d'une exonération sur les dividendes ainsi reçus, sous réserve de l'imposition d'une QPFC. Le taux de cette QPFC est fixé forfaitairement à 5% et peut être abaissé à 1% dans certains cas (par exemple, en cas de distributions au sein d'un groupe d'intégration fiscale).

 

L'objectif de ce régime est d'éviter une double-imposition des profits: une première fois lors de leur réalisation au niveau de la filiale puis une seconde fois lors de leur distribution au niveau de la société mère.

L'administration fiscale considère que la réintégration d'une QPFC constitue la contrepartie de l'exonération du dividende : les produits de dividendes étant exonérés, les charges contribuant à la réalisation de ces revenus (et évaluées forfaitairement à 5% ou 1%) sont non-déductibles pour la détermination du résultat fiscal.

 

Ainsi, l'instruction fiscale qui commente l'article 216 du Code général des impôts précise qu'il « fixe un mode de calcul pour la réintégration des charges afférentes à des produits [dividendes] qui ne sont pas imposés et ne peut s'analyser comme conduisant à l'imposition d'une partie des dividendes. »[4]

 

Compte tenu de cette interprétation de l'article 216 du Code général des impôts, visant à considérer que la réintégration d'une QPFC pour la détermination du résultat imposable ne constitue pas une imposition des dividendes mais un simple mode de calcul, aucune imputation de crédits d'impôt étrangers sur l'impôt sur les sociétés payé au titre de la QPFC réintégrée ne pouvait jusque-là être effectuée. Dès lors, en pratique, les dividendes reçus par des sociétés mères françaises de filiales étrangères subissaient dans certains cas toujours une double imposition à hauteur de l'impôt sur les sociétés dû au titre de la QPFC : une première imposition via l'application d'une retenue à la source dans l'Etat de la société distributrice et une deuxième imposition en France via la soumission à l'impôt sur les sociétés d'une QPFC. 

 

La récente décision du Conseil d'Etat ouvre à cet égard une opportunité pour les sociétés mères françaises percevant des dividendes de filiales étrangères qui sont soumis à une retenue à la source dans l'Etat de résidence de la filiale. En effet, le Conseil d'Etat a décidé que, compte tenu du caractère forfaitaire de la QPFC sans possibilité pour les entreprises de limiter son montant à celui des réels frais et charges supportés par la société mère française en vue de la perception des dividendes, les dispositions de l'article 216 du Code général des impôts « doivent être regardées non comme ayant pour seul objet de neutraliser la déduction, opérée au titre de ses frais généraux, des charges afférentes aux titres de participation dont les produits sont exonérés d'impôt sur les sociétés, mais comme visant à soumettre à cet impôt, lorsque le montant des frais est inférieur à cette quote-part forfaitaire, une fraction des produits de participations bénéficiant du régime des sociétés mères. »[5]

 

Le Conseil d'Etat reconnait donc que la QPFC peut bien constituer une imposition des dividendes. Il vient ainsi confirmer la position de la Cour Administrative d'Appel de Lyon qui a jugé au début de l'année que la soumission à l'impôt sur les sociétés de la QPFC fixée forfaitairement « s'analyse comme une modalité d'imposition » des dividendes.[6] Plus précisément, la soumission de la QPFC à l'impôt sur les sociétés constitue une imposition des dividendes lorsque le montant des frais et charges réels supportés par la société mère française pour la perception des dividendes est inférieur au montant forfaitaire de la QPFC de 5% (ou 1% dans certains cas).

 

En conséquence, cette décision ouvre la possibilité, pour les sociétés mères françaises percevant des dividendes ayant supportés une retenue à la source dans l'Etat de la filiale distributrice, de demander l'imputation des crédits d'impôt étrangers correspondants. Reste à savoir si l'imputation des crédits d'impôt étrangers sera admise à hauteur de l'impôt sur les sociétés dû sur la totalité de la QPFC ou simplement sur la différence entre le montant de cette QPFC et celui des frais et charges réellement supportés par la société mère pour la perception des dividendes.

 

En tout état de cause, les sociétés mères concernées ont tout intérêt à déposer, dès à présent, des réclamations pour se prémunir de leurs droits en sollicitant une imputation des crédits d'impôt étrangers sur l'impôt sur les sociétés résultant de la réintégration du montant total de la QPFC.

 

Notre équipe d'avocats fiscalistes est à votre disposition pour vous accompagner dans cette démarche.

 

[1] Conseil d'Etat, 8è et 3è ch., 5 juillet 2022, n°463021, SA AXA

[2] Codifié à l'article 216 du Code général des impôts

[3] Ces conditions sont prévues par l'article 145 du Code général des impôts (en résumé, la société mère doit être soumise à l'impôt sur les sociétés en France et détenir une participation d'au moins 5% dans la filiale pendant au minimum 2 ans)

[4] Doctrine administrative BOI-IS-BASE-10-10-20 du 11/03/2021 §100

[5] Conseil d'Etat, 8è et 3è ch., 5 juillet 2022, n°463021, SA AXA, considérant 4 :

« 4. Compte tenu du caractère forfaitaire de la quote-part des produits de participations qu'une société mère doit réintégrer à son bénéfice en application du I de l'article 216 du code général des impôts, sans possibilité pour cette dernière de limiter cette réintégration au montant réel des frais et charges de toute nature exposés par elle au cours de la période d'imposition en vue de l'acquisition ou la conservation des revenus correspondants, les dispositions citées au point 2 doivent être regardées non comme ayant pour seul objet de neutraliser la déduction, opérée au titre de ses frais généraux, des charges afférentes aux titres de participation dont les produits sont exonérés d'impôt sur les sociétés, mais comme visant à soumettre à cet impôt, lorsque le montant des frais est inférieur à cette quote-part forfaitaire, une fraction des produits de participations bénéficiant du régime des sociétés mères. »

[6] Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 27 janvier 2022, 20LY00698, SCS A Raymond et Cie, Inédit au recueil Lebon

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